
Devant nos dépendances, nous devrions agir comme l'indique Locke à Charlie : n'attends pas qu'il n'y ait plus de ta drogue, jette-la avant que ce soit son absence qui te contraigne au sevrage, éprouve ta liberté en décidant toi-même de la jeter.
Nous sommes tous les rescapés du vol 815, nous sommes tous en train de survivre en quête de sens sur cette putain d'île.
Un antisémite sur Facebook, c'est un peu comme un islamophobe en pèlerinage à La Mecque.
Vu The Social Network.
David Fincher avait là un sujet en or : un asocial qui crée le plus grand "réseau social" du monde, un ascète qui fonde un lupanar virtuel, un quasi-autiste à la tête du royaume de la gaudrillole, du poke, du tutoiement, des "amis" et des demandes d'"amitié". Cette contradiction apparente comme condition absolue de l'aliénation de 700 millions d'individus. Le pouvoir d'aujourd'hui : ses causes, ses effets, sa nature.
Eh bien au lieu de cela, au lieu d'un grand film politique et métaphysique, nous avons affaire à un vulgaire film ... de procès. Mise en scène plate, insipide et sans aucune idée (et quand idées il y a elles sont catastrophiques de laideur, comme la scène ridicule et inutile de la course de canoë-kayaks, entre autres), telle une ingestion de scorsesisme mal digérée (on sent bien l'influence de films comme le génial Casino, où la musique omniprésente sert d'ossature à la narration déstructurée, mais là où Scorsese en faisait rythmique, trame narrative et fond du sujet tout à la fois, Fincher n'en fait qu'un fade décorum), dialogues convenus, ce film qui aurait pu et dû être une réflexion sur un bouleversement dans l'atonie, une révolution le cul sur sa chaise, n'est que la chronique de la création de Facebook et des imbroglios entre Zuckerberg et ses divers acolytes.
Et c'est navrant.
Seul grand moment : après deux heures de patience qui nous rend susceptibles de prétendre à la sainteté, la dernière scène : Zuckerberg, seul dans la salle où se tient l'audition des différentes parties de l'affaire, devant son ordinateur portable, va sur le "profil Facebook" de sa petite amie du début du film qu'il avait insultée via son blog (petite amie qu'il tente de récupérer au milieu du film et qui refuse) et lui fait une "demande d'ami". Double aliénation : Zuckerberg à cette fille qui de façon absolument dérisoire et pathétique n'a plus que sa création, Facebook, et ses termes galvaudés pour rester en contact avec elle, et cette jeune femme, qui malgré l'outrage que son ex lui a fait subir, ne résiste pas à sa création, Facebook donc. Grande scène de solitude et d'enfermement, absolument tragique de par sa misère même.
Mais c'est tout, et c'est bien peu, et c'est bien tard.
1 commentaire:
Intéressante critique. Si je puis me permettre, je ne vois pas ce que Facebook a de juif. Aussi, il me semble qu'un antisémite sur Facebook, c'est surtout la même chose qu'un antisémite vacciné contre la polio, ou qui se sert d'un ordinateur équipé d'un Pentium Dual-Core, ou qui utilise un téléphone portable, ou qui roule en Mercedes.
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